Nos vacances idéales

(Pour en savoir plus sur l’atelier d’écriture, c’est ici)

Chacun décrit ses vacances idéales dans un lieu tiré au hasard. Chaque participant rédige un des paragraphes de chaque texte. (exemple : octobre 2020)

Le Cantal

Les valises étaient prêtes. Le chat semblait résigné à les voir partir. Les enfants étaient déjà installés devant leurs écrans à l’arrière de la voiture. Lucille décida de conduire. Laurent s’inclina. Le voyage, comme à chaque fois, sembla long, fastidieux. Mais l’arrivée n’en fut que plus joyeuse. Les enfants exaltés, oublièrent Snapchat pour courir saluer Justin et ses brebis. Laurent ouvrit une bouteille de Boudes, et en tendit un verre à Lucille qui l’avait bien mérité. Le bonheur n’attend pas.

Justin vint les rejoindre pour partager un verre. Il avait tout prévu pour le repas du soir. Toute la famille allait goûter à la spécialité du coin : une bonne truffade accompagnée d’une petite salade afin que la marche du lendemain puisse avoir lieu sans problème. En effet il avait aussi prévu de les guider jusqu’à Prat-de-Bouc afin que la petite famille fasse l’ascension du Plomb du Cantal. “Avez-vous au moins apporté de bonnes chaussures ?” Curieusement, même les enfants qui habituellement passaient leur temps sur les écrans, étaient très satisfaits de ce projet. Qui va être le premier au sommet ? Qui va gagner ?

Cette journée fut une journée témoin qui se répéta chaque jour de la semaine avec au menu, des balades, la cueillette des champignons, les parties de cache-cache ou les courses au trésor dans les bois, et bien sûr une visite des caves à fromage, les soirées autour de la cheminée après un dîner réparateur qu’ils prenaient sans remords. On verra en rentrant si le régime s’impose. À refaire !

Dans un couvent de religieuses muettes

Exténué, surmené, prêt à tout lâcher, Émile songeait jour et nuit à des vacances de l’extrême, pour fuir l’enfer. Contradictoire, paradoxal et égal à lui-même, il rêvait d’un lieu où il serait aussi, oserais-je le dire, le seul à pouvoir se faire entendre. Ainsi naquit et se développa son fantasme d’un lieu à la fois spirituel, apaisant, où on lui fiche la paix, n’était le très rigoureux rituel. Et où, ne serait-ce qu’avec parcimonie, il aurait la possibilité, que dis-je, le sentiment de pouvoir se faire entendre. À sa guise, n’était le respect des rites et horaires de ces dames. On serait autour de lui, bien sûr on lui ficherait la paix. Pas de gadget à commande vocale, juste de temps à autre un petit billet, sans équivoque, juste pour s’assurer de la bonne santé, de la bonne observance des rites et horaires… Pas de mots doux, pas de demande, pas d’attente : que des gestes de prévenance. On pourrait y passer sa vie – ou gentiment ses vacances.

Arrivé dans ce couvent de religieuses muettes, sa surprise fut totale, et vous le croirez, elles faisaient un bruit énorme, le déplacement des objets… les communications entre elles, tout envahissait l’espace, étaient-elles sourdes aussi ? Probablement. Sa seule solution fut de se réfugier dans sa chambre et d’en sortir seulement pour les repas. Même les offices se passaient dans un tumulte de mouvements codés qu’elles seules comprenaient.

Fort heureusement, la mère supérieure, inquiète de voir Émile isolé des journées entières dans sa cellule, lui procura un casque anti-bruit. Il put ainsi savourer le ballet harmonieux , chorégraphié, et désormais silencieux, des cornettes hors-d’âge, des encensoirs et des soupières. Et c’est l’esprit serein qu’il rentra dans ses pénates, muni du précieux casque.

Laponie

L’aéroport de Rovaniémi… j’étais arrivée, mon rêve devenait réalité en ce mois de février…

L’avion s’était posé souplement à 16h30 et il faisait presque nuit, l’équipage avait annoncé -25° et déjà le bonhomme de neige de trois mètres de haut à la sortie de l’aéroport nous invitait à la découverte.

Il me restait à rejoindre l’hôtel éphémère de glace où j’allais passer mes quinze jours de vacances.

La première semaine se déroula sans encombres, selon le programme établi : visite de la “Cité du Père Noël”, dont je me serais bien passée (même au-delà du cercle polaire, un parc d’attraction est toujours décevant), excursions en traineaux et aurores boréales, ragoût de renne et aquavit.

Je n’aurais jamais imaginé qu’un banal problème de chauffe-eau (eh oui, même dans un “hôtel éphémère de glace” il faut bien pouvoir se laver…) aurait des conséquences aussi ; conséquentes ! Ce qui n’était au départ qu’une petite fuite, un joint défectueux sans doute, transforma tout le complexe en une gigantesque congère marécageuse. Le personnel courait en tous sens, à la pêche aux bagages et effets personnels de la clientèle. Nous étions réfugiés dans le bâtiment du sauna, institution salvatrice, ô combien providentielle !

Les espérances, les premières impressions, la magie de l’endroit, ont très vite perdu leur charme et le retour vers Paris était attendu par tous les vacanciers.

Seule sur une île déserte

Comme convenu, le cargo Tropical Monckey était à quai. M. Le Dantec, le capitaine, me montra ma cabine. Elle était à la fois spartiate et fonctionnelle. Il était prévu de lever l’ancre dans la nuit afin de profiter d’une « fenêtre », la météo en cette saison étant très changeante. Le 17 novembre, à 1h43, nous quittions le port de Saint-Nazaire. Le capitaine Le Dantec, en accord avec la Compagnie des Robinsons Maritimes, avait prévu de se détourner vers les Îlots de la Désolation, de m’y déposer, puis de continuer vers Cayenne. Le 23 novembre, une chaloupe me déposa, mes bagages et moi, dans la crique dite « du Corsaire ». Il était 9h du matin.

Le soleil brillait de tous ses rayons. Je fus prise d’un immense fou-rire. Enfin, j’y étais sur cette île déserte tant désirée ! Je me débarrassai de mes frusques, me roulai dans le sable, puis plongeai dans les vagues. Puis je me roulais dans le sable et plongeais dans les vagues. Je pensais alors que ma vie allait se réduire à ces deux activités pour le restant de mes jours. Lorsque la faim se fit sentir, je me dirigeai vers les arbres qui me tendaient leurs fruits, comme autant d’offrandes à la visiteuse. Je me délectais de leur jus suave. Ensuite je m’endormis sous l’ombre bienveillante des palmiers. Au réveil, je me roulai dans le sable, puis je plongeai dans les vagues.

Et me roulais dans le sable et plongeais dans les vagues. C’était super ! Le voyage dont je rêvais depuis si longtemps… mais tout de même, j’aurais bien aimé partager ces moments avec quelqu’un. Après m’être installée près du feu de bois que j’avais ramassé et auquel j’avais su mettre l’étincelle, je cherchais dans le tas de frusques mis de côté mon téléphone portable. Mais voilà, la batterie était à plat !…

Sur la plage d’Agadir

Cette année nous avions envisagé un séjour de vacances au soleil. Il y a bien longtemps que nous avions envie de traverser la Méditerranée, peut-être même d’aller faire un tour dans les immensités de sable qui y existent.

On avait aussi souhaité un départ d’une façon particulière. Il y a quelques temps j’ai fait la connaissance du pilote de petits « coucous », qui était particulièrement admiratif de l’Aéropostale.

Comme le trafic aérien commercial était interrompu – pour un temps indéterminé – et surmontant une phobie de ce genre d’appareils volants, je finis par me faire une raison : pourquoi ne pas répondre à sa proposition de se rendre ensemble à Agadir ? Ce serait avec deux, voire trois escales, sans vol de nuit, et au risque tout de même de ne pouvoir sauter les frontières : le pilote décida de survoler l’océan, autant que faire se peut, pour passer entre les mailles. Et bien sûr nous dûmes réduire nos bagages à presque rien.

Arrivés à Agadir, nous comprîmes, Marcel, le pilote, et moi, que nous étions follement tombés amoureux l’un de l’autre. Je laissai mon mari en plan et nous partîmes main dans la main, vers la plage. La plage d’Agadir, là où il me semblait avoir toujours vécu…

Une chambre d’hôtes aux Açores

Nous avions choisi de partir en vacances aux Açores pour découvrir l’origine du fameux anticyclone. Pour nous y rendre, on pouvait choisir l’avion, trop rapide. Un cargo qui traversait l’Atlantique nous largua aux Açores. Nous avions réservé une chambre d’hôtes.

Notre choix visait à avoir un contact direct avec les habitants et nous arrivions avec un a priori favorable puisque nous connaissions bien une personne originaire des ces îles, qu’elle nous décrivait comme sauvages et propices à de longues randonnées dans des paysages volcaniques et étranges.

Nos hôtes étaient charmants et prêts à tout pour rendre notre séjour agréable.

Nous connaissions le Portugal, mais comme toujours, les îles ont une vie propre, des habitants différents et des paysages spécifiques. Oserais-je le dire ? Ce fut une déception à tous les niveaux.

Nos hôtes si avenants, se replièrent vite, ils étaient surtout cupides et finirent par rire de notre sentiment de solitude, voire de panique : allions-nous repartir, rentrer enfin ? En attendant les petits avatars étaient sur tout : la plomberie, la robinetterie, les oiseaux qui chantaient la nuit, les rares touristes qui réussirent à faire du tapage. Et une nourriture bien décevante.

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